Cette étude s'est intéressée au développement des compétences d'apprentissage par le jeu vidéo, en utilisant des binômes d'enfants, qui peuvent donc s'aider l'un l'autre, dans une collaboration. La collaboration aidant les enfants, autant que la stratégie, à améliorer leurs performances. Ils ont recueillis des données qualitatives, en regardant leurs résultats, ainsi que leur comportement.
La collaboration et l'apprentissage sur un jeu vidéo
La capacité à résoudre des problèmes n'est pas innée, elle est acquise et se développe. Pour cela, la compétitivité offerte par les jeux vidéos est un grand atout. L'est également la motivation à réussir, offerte plus spécifiquement par le côté ludique des jeux, que n'ont pas les exercices basiques. Des modèles ont été proposés pour évaluer l'implication et la motivation des enfants jouant sur un jeu vidéo. Il y a dedans 8 aspects principaux, qui sont comme des indices révélateurs de la motivation: Immersion, Les interactions avec les autres, le challenge, la clarté du but, le feedback, la concentration, le contrôle, et l'apprentissage de connaissances.
Les critères de réussite d'un jeu, quant à eux, sont: Le but et la tâche (qui doivent être clairs), le challenge (le jeu doit être adapté au niveau des enfants, pour pas qu'ils s'ennuient, et pour pas qu'ils soient démoralisés), l'authenticité (le jeu doit ressembler aux situations réelles pour pouvoir transférer ce qui est appris dans le virtuel sur le réel), l'explorabilité (la possibilité d'utiliser plusieurs stratégies pour arriver au but), l'interactivité (le jeu doit interagir avec les joueurs pour gagner leur confiance), le feedback (à des moments adéquat, le feedback peut augmenter la motivation), la compétition (qui stimule la motivation également), la coopération (on peut s'aider des autres joueurs pour réussir une tâche trop complexe), l'apprentissage (on doit pouvoir savoir ce qu'on a appris par le jeu).
Ils ont croisé ces critères avec ceux d'une bonne résolution d'un problème, les critères suivants étant croissant en difficulté cognitive: savoir, comprendre, appliquer, analyser, créer, et évaluer ce qu'on a fait. Ils sont rangés par niveau de 1 à 6.
Ils introduisent ensuite la différence entre collaboration et coopération:
La collaboration, c'est quand chacun a une partie du travail à faire, et la coopération, c'est quand tout le monde travaille ensemble sur toute la tâche. La collaboration étant plus propice à un apprentissage solide et profond, en même temps qu'elle améliore la motivation.
Liu (2001) a décrit 3 niveau de résolutions d'un jeu, et sa manière de le penser: "Randomly thinking": les joueurs procèdent par essai-erreurs, ne savent pas se corriger et répètent leurs erreurs. "Heuristic thinking": les joueurs font d'abord des erreurs, mais ajustent ensuite leur réflexion pour éviter ces erreurs. "Analytical thinking": les joueurs suivent un raisonnement logique pour résoudre un problème, ils y pensent avant.
Matériel
Ils ont utilisé un jeu vidéo créé pour l'étude, qu'ils ont appelé "l'aventure de William". Il s'agit d'un jeu à plusieurs étapes. Dans chaque étape, le ou les enfant(s) doivent faire des choix, résoudre des problèmes, réfléchir, observer, se souvenir de ce qu'ils ont vu, se localiser dans l'environnement, classifier des objets, discriminer des couleurs et faire des associations entre des concepts.
Ils ont fait faire le jeu d'abord à 2 filles de 11 ans, individuellement, puis il les ont mis dans un binôme mixte, avec un garçon de 11 ans également. Ils ont contrôlé que le jeu était aussi motivant pour les garçons que pour les filles, supposant qu'il y avait une différence de genre.
(Intéressant à noter: selon une étude de 2004 menée à Taiwan, la plupart des joueurs sont des étudiants, et 63% des enfants de 5 à 9 ans jouent à des jeux en ligne, ils sont donc bien préparés à l'utilisation d'un ordinateur)
Ils ont enregistré une vidéo des enfants et une vidéo de l'écran.
Résultats
Une des deux fille a fait plus de tâtonnement que l'autre (en retournant plus de fois dans les mêmes lieux), mais celle-ci était par contre plus rapide. Elle était également une "heuristic thinker", à savoir qu'elle savait revenir sur ses erreurs et créer des solutions, ce que l'autre fille ne faisait pas, étant plus "random thinker". Durant la tâche en collaboration, quand elle a refait le même jeu avec un partenaire, elle l'écoutait, et lui expliquait ce qu'elle faisait, alors que l'autre fille restait silencieuse.
C'est seulement quand les filles ont eu des problèmes que les garçons ont commencer à intervenir dans le binôme. Le partenaire de la première fille était plus efficace, parlait plus, aidait plus, et ça a permit de réussir beaucoup mieux que l'autre groupe où il y avait peu de discussions, et plus de bagarres gestuelles, sur la prise de la souris, par exemple. La bonne qualité de l'interaction a donc permit de mieux développer les capacités de résolution de problème.
Par contre, les discussions du deuxième groupe étaient plus logiques, plus ciblées, moins dispersées que l'autre groupe, ce qui est contrebalancé par le fait que le partenaire du premier groupe était plus à même de discuter, proposer des solutions et questionner le problème que le partenaire du second groupe.
Ils ont donc affirmé que les pairs avait une forte influence sur les capacités d'une personne, et que meilleure est l'interaction entre eux, meilleure est l'évolution de ces capacités. Il y a plusieurs styles de collaboration possibles, soit en restant individuel dans le groupe, en essayant chacun son tour quelque chose, soit en collaborant réellement, et c'est cette deuxième collaboration qui est la plus efficace pour le développement des compétences.
Discussion
Le design et le développement de l'apprentissage par ordinateur a donc des effets sur l'apprentissage. La collaboration également, mais cela dépend des modèles, des stratégies et de l'atmosphère de collaboration qu'il y a dans le binôme, car autant un collaboration positive et favorisant les relations de collaboration, peu importe les tempéraments des individu, est efficace pour le développement des performances cognitives, autant s'il n'y a pas d'interaction possible, chacun reste au niveau auquel il était individuellement. L'avantage est aussi que dans une bonne interaction, même ceux qui sont en retard dans l'acquisition des compétences peuvent se rattraper, aidés par leur partenaire.
Il pourrait être également intéressant de s'intéresser au genre: l'effet de la collaboration sur un jeu vidéo en fonction du sexe. Il faudrait aussi essayer avec des garçons jouant en premier individuellement, pour savoir comment cela se passe quand ce sont eux qui prennent le contrôle (connaissant le jeu).
Source: Shih, J. L., Shih, B. J., Shih, C. C., Su, H. Y., Chuang, C. W. (2010). The influence of collaboration styles to children’s cognitive performance in digital problem-solving game “William Adventure”: A comparative case study, in Computers and Education, 55, 982-993
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